Pour la première fois, grâce à Armel Guerne, il nous est possible, à nous Français si immédiatement frères de cet enfant hanté par la parole claire et par l'enracinement au passé, de le suivre, de s'y brûler comme d'en tirer joie et délivrance. Traducteur de Novalis, Armel Guerne est aussi en cette édition le metteur en scène d'un grand spectacle lyrique. Il fait parler les textes comme un grand chef d'orchestre fait parler les partitions.
Claude Mettra - La Quinzaine littéraire, du 1er au 15 avril 1975
Au moment où le romantisme français naît avec le Génie du christianisme, l'idéalisme romantique a déjà atteint en Allemagne son expression la plus haute, son extension définitive. C'est ce que nous rappelle heureusement la publication de ces Œuvres complètes. Armel Guerne, à qui le romantisme allemand doit tant, les a établies, traduites et présentées avec une passion exemplaire.
R -B. - Le magazine littéraire n° 98, mars 1975
Grâce à l'important travail de traduction et de présentation d'Armel Guerne, les Éditions Gallimard peuvent publier, en deux forts volumes, les œuvres complètes de Novalis. Textes, poèmes, romans, notes, nous invitent à une redécouverte prodigieuse.
Tribune Dimanche Lausanne, 18 mai 1975
Les Editions Gallimard publient pour la première fois en France les « ŒUVRES COMPLETES » de NOVALIS. Cette publication en deux tomes par Armel Guerne est un évènement littéraire dont il faut saluer l'importance.
J .J. Gabut - Centre Dimanche - Le Progrès (SAINT-ETIENNE), 23 mars 1975
Du côté de l’angélisme
Comme il est difficile, et poignant, et émouvant, d’écrire sur certains êtres. Novalis est de ceux-là. Superbement restitué dans sa mystérieuse clarté par Monsieur Armel Guerne, son préfacier et traducteur, il est enfin possible de le lire en français dans sa durée, sans être obligé de recourir à des éditions diverses et inégales.
Difficile, oui, de parler de Novalis aujourd'hui parce qu'il représente cette part mystique du romantisme allemand qui paraît a priori si éloigné de nos mentalités matérialistes, et aussi parce que son mysticisme, tout nourri qu’il est de catholicisme, se situe au-delà de toute représentation chrétienne.
Et émouvant, oui, parce que tout compte fait, c'est bien la première fois qu'on peut découvrir cet esprit si singulier, si merveilleusement singulier, si angéliquement singulier ...
Et poignant, oui, parce qu’il est mort à 28 ans, authentifiant ainsi la pensée de Menandre, poète grec, selon qui, ceux qui meurent jeunes sont aimés des dieux.
Mais avant d'aller plus loin dans la découverte de cet archange, je voudrais dire un mot au sujet du travail de Monsieur Guerne. En général, on passe sous silence ce que font les traducteurs, comme si cela allait de soi. Ici, il faut au contraire crier tout haut qu'une pareille traduction tient du miracle. À croire que la véritable langue de Novalis aurait dû être la française, et non l’allemande. À croire que Novalis s'est trompé de pays.
Il est vrai que son esprit l’inclinait vers la pensée latine et que le choix même de Novalis pour pseudonyme marque une préférence linguistique évidente. Bref, il semble que Monsieur Guerne, en traduisant comme il vient de le faire ses oeuvres, ait réalisé avec éclat l'un des rêves les plus secrets de cet homme qui n'a vécu que pour le rêve.
Quant à la préface, elle est en tout point admirable. Je ne crois pas qu'on ait jamais poussé si loin que l'a fait M. Guerne l'analyse de ce qu'est l’expression poétique, en quoi je vois une parole donnée (parole donnée par les dieux, parole donnée comme un serment).
Sous le titre de NOVALIS OU LA VOCATION D'ÉTERNITÉ, il y a là une trentaine de pages qui m'ont transporté, et lavé. Pages fluides, eau lustrale, sans quoi la préparation à la lecture de Novalis serait incomplète. Car il faut se préparer à lire Novalis. Il faut être en état grâce. Et Monsieur Guerne fait ici office de mystagogue. J’ajoute qu'en dépit des études de Monsieur Marcel Brion dans son ALLEMAGNE ROMANTIQUE ou du regretté Albert Béguin dans L’ÂME ROMANTIQUE ET LE RÊVE, Monsieur Guerne, poussant Novalis du côté de l'angélisme, jette sur son modèle une lumière nouvelle ou plutôt, le nimbe de cette mystérieuse clarté qui lui est propre et que je disais en commençant. C'est dire que Novalis occupe une place à part dans le mouvement romantique allemand. Je n'aurai garde d’oublier que Ludwig Tieck disait de lui dès 1801 qu'il fut la plus pure et la plus séduisante incarnation d’un esprit hautement immortel. À quoi Charles du Bos paraît faire écho lorsqu'il écrit : Novalis est par définition l'homme pour qui les choses invisibles sont réelles... Voyons cela de plus près.
De son vrai nom, il s'appelle Friedrich Léopold Von Hardenberg. Il est de très ancienne noblesse prussienne. Né à Oberwiederstedt le 2 mai 1772, il meurt à Weissenfelds le 25 mars 1801. Son pseudonyme, il le tire d'une très vieille tradition de famille : dès le XIIIe siècle, en effet, les seigneurs de Hardenberg utilisaient parfois l'adaptation latine de leur nom : de Novali ou Novalis.
Et maintenant, faut-il se donner le ridicule de le doter d'une biographie, c'est à dire d’accabler son court passage sur cette terre de dates plus ou moins trompeuses ? Que saura-t-on de plus de lui si je dis qu'il fût destiné de bonne heure à devenir ingénieur des mines (son père dirigeait les salines de Weissenfelds) ? Sera-t-on plus avancé si j'ajoute que sa famille l'envoya en 1790 à l'université d’Iéna où il suivit les cours de philosophie de Reinhold et les cours d'histoire de Schiller, à qui il s'attacha vraiment ? Bien sûr, il est bon de savoir que c'est également à Iéna que Novalis rencontre Fichte dont la philosophie fût sa principale inspiration intellectuelle, et les frères Schlegel, qui devaient au plus tard accueillir dans leur revue « l’Athenaum » les rares textes qu'il publiât de son vivant.
Mais tous ces renseignements, et d'autres encore, ne sont que des renseignements, et non des enseignements. Car enfin, combien d’étudiants ont suivi les mêmes cours que Novalis, à ses côtés ? Seul, ce dernier sut leur donner vie. Cela revient à dire que les maîtres se rencontrent par disposition naturelle, par affinités personnelles. Novalis est dans Friedrich Leopold Von Hardenberg dès sa naissance. Tout son chemin dans ce monde consiste à aller à sa propre rencontre. Certains esprits élus l’y aideront — sans plus.
Un enfant va l’y aider, et de la façon la plus angélique qui soi. C'est à Tennstadt, en 1795, que Novalis fit la connaissance de Sophie, et aussitôt naquit un étrange amour, un amour absolu, entre le poète de vingt-trois ans et sa petite fiancée, âgée de 13 ans à peine. Très consciemment, Novalis fit de cette enfant sa médiatrice vers ce monde du divin dont il portait en lui la nostalgie. Sophie devint le centre de sa vie. Las ! Atteinte d'une maladie de poitrine, elle devait mourir deux ans plus tard : Pour moi, écrit Novalis trois jours après ce décès, le soir est arrivé tandis que j'avais encore les yeux tournés vers l’aurore.
De là date le grand descellement, le formidable ébranlement sur lequel il n'est pas d’artistes véritables et à partir duquel l’œuvre enfin jaillit, source pure. Sophie morte, elle va se mettre à vivre. Novalis se persuada en effet qu'il lui appartenait de mener, en quelque sorte, cette mort jusqu'à sa perfection, non pas en désertant ce monde, mais en franchissant les limites de celui-ci. C'est à nous de chercher à devenir immortels... dit-il. Et encore : je veux mourir, non comme un être épuisé que la nature abandonne, mais libre comme l'oiseau de passage qui cherche d'autres climats, et joyeux comme un jeune poète.
De la vont naître ces admirables HYMNES A LA NUIT, puis ce fragment inachevé où s'exprime son « idéalisme magique » LES DISCIPLES A SAÏS. De là, enfin naîtra cet HENRI D’OFTERDINGEN, roman dans lequel, se doublant de la figure de la nouvelle amante terrestre, Julie Von Charpentier, la très douce et très pure Sophie Von Kuhn est transfigurée jusqu'à être cette femme idéale d'un monde de perfection auquel le héros atteint au terme de ses pérégrinations dans le monde des apparences.
Il faut conclure (comme si l'on pouvait conclure !). Novalis a été et ne cessa pas un instant d'être éternellement le génie éternel de l'adolescence, écrit Monsieur Guerne. Oui ! Et c'est assurément pour cela qu'on le lit parfois en pleurant. Non pas le plus grand poète, mais « le plus naturellement surnaturel de tous ». Oui ! Écoutez donc cette parole donnée, ces paroles magiques ! Car enfin, c’est là , oui, là, dans ses oeuvres, et pour la première fois peut être depuis les temps lointains d’Orphée ou ceux de la légende d’or et peut-être des petites fleurs de Saint François d'Assise au cœur de la chrétienté, c'est la que le regard soudain se dirige dans le sens vrai de toutes choses, qu’il obéit à un Orient véritable, et qu’il cherche, au-delà de la pénétration, l’accord.
Oui, cher Armel Guerne, Novalis nous rend à nous-mêmes en nous rendant l’accord avec le monde ! Merci.
Henry BONNIER - La Dépêche du Midi Dimanche, 23 février 1975
L'œuvre de Novalis me paraît si évidemment et fondamentalement de nature poétique, que je ne résiste pas à vous conseiller vivement sa lecture ou sa relecture. Au demeurant, la préface de Monsieur Armel Guerne, est en elle-même un chef-d'œuvre du genre.
J. P. Rosnay - Nouvelles littéraires, 10-03-75
Grâce à cette traduction nouvelle, voici Novalis chez vous : deux livres ouverts écrits dans cette « prose lyrique, fluide et ample à la fois », qu'évoque le préfacier et qu'il sait rendre admirablement en français. Car il faut lire Novalis, le lire pour l'aimer. Comme l'écrit Armel Guerne, à qui il faut être reconnaissant de cette magnifique édition.
Jean-Claude WALTER - Dernières Nouvelles d'Alsace, 14 avril 1975
Fragments constituent, dans leur profusion jaillissante, une source inépuisable de découvertes et ce n'est pas le moindre intérêt de la remarquable édition en deux volumes qu'Armel Guerne nous donne des Œuvres complètes que de nous en révéler enfin la totalité.
André Gascht - Le Soir (Bruxelles), mercredi 26 février 1975
Grâce à Armel Guerne, excellent traducteur, on peut découvrir pour la première fois, en français et dans sa continuité, l'œuvre de Novalis.
Pierre Sipriot - Le Figaro littéraire, 15 février 1975
Œuvre pour la première fois, publiée intégralement en langue française. Travail considérable et difficile, mais qu'Armel Guerne a mené à bon port grâce à l'admiration éperdue qu'il voue à l'auteur des Hymnes à la Nuit.
Jacques Frank - La Libre Belgique (Bruxelles), 19 mars 1975
La traduction du poète Armel Guerne est une œuvre véritable. Elle brille dans la mémoire et ravit en nous le goût littéraire et la pensée.
Nicole Casanova - Quotidien de Paris, 12/13 avril 1975
Grâce soit rendue à Armel Guerne, traducteur exemplaire !
Hubert Juin - Magazine littéraire n° 100, mai 1975
On devait à Armel Guerne certaines traductions du poète. Il couronne son effort par ce grand œuvre, cette somme poétique. On lira l'excellente introduction : elle est d'un poète qui a éprouvé en profondeur l'œuvre de son poète. Et grâce à M. Guerne, il sera possible au grand public de connaître ces textes, tous importants.
Raymond Pouillart - Les Lettres romanes t. XXIX, 1975 – Université catholique de Louvain
Ces Œuvres complètes sont, au sens le plus fort du mot, un événement littéraire, et "La Pléiade" se fut honorée en l'incluant dans sa prestigieuse bibliothèque.
Dom Claude Jean-Nemy - Zodiaque, avril 1975